le D-Day de l'élève pilote

Et oui, à force de faire des ronds en l'air, des navs triangulaires et d'avoir réussi le test théorique, il fallait bien que ce jour arrive...
Philippe me communique donc les coordonnées du FE qui aura pour mission je l'espère de me faire entrer dans la cour des grands.
Je l'appelle comme convenu pour fixer la date. "OK, pas de problème pour le 14 septembre, rendez-vous à 13h à l'aéro-club, vous me préparez une navigation vers Orléans Saint Denis."
Première bonne nouvelle, la nav n'est pas méchante et je suis déjà allé en solo à Orléans, à tous les coups il va me coller un déroutement à Chartres !
Les jours précédants le test, je chiade ma nav, log de nav nickel, tout y est inscrit, les fréquences, les points de reports, bref, toutes les infos qui font d'un log de nav un bon log de nav ! Je me paie même le luxe d'une coupe verticale de la nav, avec identification de toutes les zones. Merci Excel, je ne connaissais pas encore Foufou à l'époque, j'avais par contre largement consommé du Gligli pour le théorique !
La veille du test, je consulte une dernière fois les paramètres: La météo de son côté sera clémente, c'est une bonne nouvelle, mais lorsque je relis les Notams, gloups... LFOZ fermé à tout trafic le 14 septembre... J'appelle le FE ou je continue et on gérera demain ? Je décide de maintenir, on verra demain. Tout est fin prêt, je ne vais pas tout reprendre à zéro.
J'arrive donc à l'aéroclub en avance, après avoir bien dormi la veille et pris un déjeuner très léger ce midi. Je remarque aussitôt une silhouette inconnue: "bonjour, vous êtes Marc X. ? Enchanté, Marc L." Même prénom, ça créé tout de suite des liens !
Je l'informe aussitôt du Notam concernant Orléans. Pas de problème, on maintient la nav initiale et on avisera en route. Là, pas de doute, déroutement garanti.
L'avion est prêt, prévol, mise en route, Atis sur 130.57, puis la tour sur 126.95.
"Chavenay de F-XC, pour un vol vers Orléans Saint-Denis..."
Tout se passe comme pour un vol normal, mon examinateur me laisse faire et observe, sans commentaires, tel un passager lambda. Nous échangeons simplement quelques banalités sur la route. Je ne change rien à mes habitudes.
Quelques minutes avant d'arriver à Orléans, le FE me dit: "on va jusqu'à Orléans, vous me montrez le terrain dès que vous l'avez en vue, puis vous me faites ensuite un déroutement vers Chartres". Bingo! je m'en doutais !
Arrivé en vue du terrain, je l'indique comme convenu à l'examinateur qui me dit aussitôt: "Ok, vous vous déroutez à présent vers Chartres".
Je sors ma fiche de déroutement, déroule les différentes actions, puis prend le cap sur Chartres, malgré le peu de points de repère entre les deux villes.
A mi-chemin, mon "passager" tire sur la manette des gazs. "panne moteur ! Atterrissage en campagne".
J'avais aussi prévu cette éventualité plus que probable, je choisis mon champ, pas trop difficile, ce n'est pas ce qui manque dans la région ! Encadrement, finale, courte puis "OK, remettez les gazs et reprenez votre navigation".
Enfin Chartres et les deux flèches de sa cathédrale sont en vue. Entrée dans le circuit, toucher puis on repart pour un second tour.
"Vous me ferez un atterrissage en lisse, vos volets sont en panne".
Là il faut que j'improvise rapidement car je n'ai jamais fait ce type d'exercice pendant ma formation. Bon allez, je majore ma vitesse en finale et tout se passe bien, même si j'avale de la piste.
Après cet intermède, le temps passe et l'examinateur m'indique que le moment est venu de regagner Chavenay, j'aurai droit sur la route aux exercices de maniabilité, décrochages et sortie de virage engagé.
Intégration par l'incinérateur à Chavenay, un toucher suivi d'une montée à pente max, puis ce sera un complet.
"C'est un bon test" me dit mon examinateur.
Cette phrase sympathique signifie pour moi la fin de ma formation, et le début de l'expérience.
Après avoir rempli toutes les formalités et remercié mon FE pour son dévouement et sa gentillesse, je me retrouve avec mon petit papier vert tant convoité.
Je me sens d'un seul coup un peu perdu, c'est fini, ou plutôt ça commence.
Le sentiment est étrange, je reste de longues minutes sur le terrain à contempler les avions en tours de pistes, je n'arrive pas à repartir.
J'ai du mal à réaliser qu'un rêve vient de se réaliser...